L’histoire de la Guinée-Conakry est intrinsèquement liée à la lutte pour la liberté et l’autodétermination, une épopée où les femmes ont toujours tenu un rôle de premier plan, bien au-delà des stéréotypes de la société patriarcale. L’émancipation des Guinéennes n’est pas qu’une question de justice sociale ; elle est la pierre angulaire du développement durable du pays, avec des bénéfices directs et mesurables pour l’ensemble de la société, et en particulier pour les enfants du pays.
Dans le sillage des ex-colonies françaises où un engagement politique fort pour le féminisme a souvent été observé au sommet de l’État après l’indépendance, la Guinée a rapidement inscrit l’égalité des sexes dans son projet national. Cet article explore les avancées historiques et récentes en matière de droit, santé, travail et répartition des tâches domestiques, soulignant comment le progrès féminin forge un meilleur avenir pour la jeunesse guinéenne.
Un Féminisme d'État Ancré dans la Lutte pour l'Indépendance
L’engagement en faveur de l’émancipation féminine (qui n’est pas seulement un phénomène occidental et récent, mais se retrouve partout sur la planète, à toutes les époques), particulièrement en Guinée, est né dans le feu de la résistance anticoloniale.
Les femmes guinéennes ont, en effet, été des piliers indéfectibles du Rassemblement Démocratique Africain (RDA), le parti qui a mené le pays à l’indépendance. Leur soutien logistique, politique et militant a été crucial à cette époque.
Le Symbole M'Balia Camara
L’icône de cette résistance est sans doute M’Balia Camara. Son martyre en 1955, alors qu’elle était enceinte, tuée par un chef traditionnel pro-colonial pour son engagement auprès du RDA, a cristallisé la détermination et le sacrifice des femmes dans la lutte de libération. M’Balia Camara est devenue un symbole national de la femme guinéenne qui se dresse contre l’oppression et pour la dignité. Sa mort tragique a non seulement galvanisé les hommes et les femmes pour l’indépendance, mais elle a aussi posé les bases d’une reconnaissance que les femmes ne sont pas de simples sujets, mais des actrices à part entière du destin national.
La Politique d'Émancipation sous Sékou Touré
Dès l’indépendance de la Guinée en 1958, le président Ahmed Sékou Touré et le Parti Démocratique de Guinée (PDG) ont lancé une politique volontariste et radicale d’émancipation féminine. Le slogan du PDG était clair : « la femme soutient le parti, le parti émancipe la femme ». Ce soutien était la reconnaissance que le projet national ne pouvait réussir sans la mobilisation et la libération de la moitié de sa population.
Des Droits Conquis : La Révolution Juridique et Politique
L’engagement en faveur de l’émancipation féminine (qui n’est pas seulement un phénomène occidentaaMalgré des structures sociales fortement empreintes de patriarcat et de traditions ancestrales, les Guinéennes ont rapidement bénéficié d’un cadre légal progressiste. Ce code, souvent en avance sur d’autres pays de la région, a octroyé des droits fondamentaux qui ont transformé leur position dans la société.l et récent, mais se retrouve partout sur la planète, à toutes les époques), particulièrement en Guinée, est né dans le feu de la résistance anticoloniale.
Les femmes guinéennes ont, en effet, été des piliers indéfectibles du Rassemblement Démocratique Africain (RDA), le parti qui a mené le pays à l’indépendance. Leur soutien logistique, politique et militant a été crucial à cette époque.
Les Avancées Notables dans le Code Civil
Des droits essentiels ont été établis, instaurant un nouveau rapport de force au sein du couple et de la société :
- Égalité au sein du mariage et devant les tribunaux : Les femmes ont été reconnues comme des citoyennes égales, avec la capacité d’agir en justice sans l’autorisation de leur mari ou tuteur.
- Liberté de gestion des biens personnels : Une rupture avec la tradition, permettant aux femmes de contrôler leurs propres revenus et propriétés, un pilier de l’autonomie économique.
- Droit au dédommagement en cas de répudiation : Cette mesure offrait une protection financière en cas de divorce unilatéral par le mari, limitant l’arbitraire et la précarité.
- Possibilité de divorcer : L’accès au divorce a donné aux femmes un moyen de sortir de mariages abusifs ou non désirés, renforçant leur droit à l’intégrité personnelle.
- Droit de s’opposer à la polygamie du mari : En exigeant l’accord de la première épouse pour un nouveau mariage, cette clause offrait une forme de contrôle sur la structure familiale.
Ces dispositions ont été des premières régionales qui ont permis aux femmes de sortir de la sphère privée pour devenir des sujets de droit autonomes.
Représentation Électorales et Politiques Publiques
L’émancipation politique a aussi été significative. En 1968, la Guinée enregistrait environ un quart de femmes parmi les députés nationaux. Ce niveau de représentation, exceptionnel pour l’époque, témoignait de la volonté politique d’intégrer les femmes aux instances de décision, reconnaissant leur légitimité et leur compétence dans la gestion des affaires publiques.
Plus récemment, en 2019, la loi sur la parité a été à l’origine d’un texte majeur stipulant que les femmes devaient constituer 50% des listes électorales pour les élections nationales et locales. Cette loi, bien que son application concrète rencontre encore des obstacles, est un outil puissant pour forcer la représentation féminine dans les sphères de décision.
On notera aussi la mise en place d’une structure de protection : la création de l’Office de protection du Genre, de l’Enfance et des Mœurs (OPROGEM) et la mise en place de stratégies nationales de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG) qui sont des signaux forts d’un engagement à traduire les droits dans la réalité. L’OPROGEM a notamment permis de développer un travail de prévention et d’aboutir à des sanctions pénales dans des cas de VBG, un pas crucial dans la lutte contre l’impunité.
Autre initiative d’ampleur : la création du Ministère de la Promotion Féminine, de l’Enfance et des Personnes Vulnérables : institution gouvernementale dédiée, pour piloter les politiques en faveur des femmes et des enfants.
L'Impact Multiplicateur sur la Vie des Enfants
Le véritable bénéfice de l’émancipation féminine se mesure à son impact sur la jeunesse. L’autonomisation des mères est directement en lien direct avec l’amélioration de la santé, de l’éducation et de la sécurité des enfants.
Amélioration de la Santé Maternelle et Infantile
Une femme émancipée est une femme qui a un meilleur accès à l’information et qui peut prendre des décisions concernant sa santé et celle de ses enfants.
- Santé maternelle : L’accès à la planification familiale, à l’éducation sanitaire et aux soins prénataux est facilité lorsque les femmes ont une voix au foyer et la capacité de gérer des ressources.
- Santé infantile : Des études mondiales confirment que l’augmentation du niveau d’éducation d’une mère est le facteur le plus puissant pour réduire la mortalité infantile. L’autonomie économique d’une mère lui permet d’assurer une meilleure nutrition, une meilleure hygiène et un accès rapide aux soins de santé pour ses enfants.
L'Éducation, Pilier de l'Avenir
L’émancipation des mères se traduit par une priorité accrue donnée à l’éducation des enfants, filles et garçons.
- Scolarisation des filles : Les mères éduquées sont les meilleures avocates de la scolarisation de leurs filles, brisant le cycle de l’analphabétisme et de la dépendance.
- Modèles positifs : Une mère active, instruite et autonome est un modèle d’ambition et de réussite pour ses enfants, les encourageant à poursuivre leurs études et à s’intégrer pleinement dans la vie économique et politique du pays.
L'Allègement des Tâches Domestiques
La reconnaissance de l’égalité et la participation accrue des femmes au marché du travail mettent en lumière le fardeau des tâches domestiques non rémunérées (notamment la corvée d’eau).
- Redistribution : Bien que les structures patriarcales maintiennent souvent une charge disproportionnée sur les femmes, l’évolution des mentalités et les efforts de sensibilisation (souvent portés par les mouvements actuels) commencent à plaider pour un partage plus équitable de ces tâches avec les maris et les enfants.
- Temps Libéré : Chaque heure économisée par la mère sur les tâches domestiques est une heure qu’elle peut investir dans son activité professionnelle, son éducation, son engagement communautaire, ou dans l’attention et le soutien scolaire de ses enfants. C’est un gain direct pour le développement humain de toute la famille.
Les Initiatives et Mouvements Actuels : un Nouveau Souffle
Malgré les acquis post-indépendance, l’égalité de genre en Guinée reste un combat quotidien. Les défis de la pauvreté, des traditions archaïques (comme les Mutilations Génitales Féminines – MGF) et de la faible application des lois subsistent. Cependant, de nombreux mouvements et leaders se mobilisent aujourd’hui pour accélérer le changement.
Le Rôle des Organisations de la Société Civile
Des organisations non gouvernementales et des associations de femmes jouent un rôle crucial dans :
- La sensibilisation et l’éducation : Elles mènent des campagnes contre les violences basées sur le genre (VBG), y compris les MGF, en travaillant avec les chefs religieux et communautaires.
- L’autonomisation économique : Des initiatives ciblées offrent des microcrédits, des formations professionnelles et un accès aux marchés pour les entrepreneures, reconnaissant que l’indépendance économique est la clé de l’autonomie personnelle.
Initiateurs du Changement et Mobilisations Citoyennes
Les mouvements actuels sont souvent incarnés par des figures féminines fortes qui utilisent les médias sociaux, les réseaux communautaires et les plateformes internationales pour amplifier leur voix. Elles incluent des journalistes, des avocates, des entrepreneures et des leaders communautaires. Ces leaders se concentrent sur :
- L’Éradication des VBG : Poursuivre le travail de plaidoyer et d’assistance aux victimes.
- La Promotion de la Parité : Lutter pour une plus grande représentation des femmes dans les postes de décision (politiques, économiques, administratives).
- La Santé Sexuelle et Reproductive : Améliorer l’accès à l’information et aux services de santé pour les femmes et les adolescentes.
La période contemporaine est marquée par une mobilisation citoyenne et associative accrue, souvent portée par une nouvelle génération de femmes instruites et connectées.
L’émancipation en Guinée ne dépend plus uniquement de l’État, mais aussi d’un tissu d’organisations de la société civile, d’ONG locales et internationales, et de jeunes entrepreneures sociales.
- Éducation et entrepreneuriat social : l’ONG Eau Z’Enfants se concentre sur l’alimentation, la santé, l’éducation et le bien-être des enfants guinéens et togolais et, d’une manière générale sensibilise les familles sur l’importance de l’éducation des filles en milieu rural ; le Labis (Laboratoire d’Innovations Sociales) de Conakry, par exemple, a accompagné des milliers de jeunes filles et garçons, soulignant l’importance du capital humain comme levier d’égalité de genre.
- Les mères d’enfants handicapés : Des projets spécifiques, comme celui mené par l’ONG FITIMA, ciblent l’autonomisation des mères d’enfants en situation de handicap. Ces femmes, souvent doublement marginalisées, bénéficient de formations et d’un appui pour la mise en place d’activités génératrices de revenus, prouvant que l’émancipation passe par le soutien aux catégories les plus vulnérables.
- La montée des jeunes leaders : De nombreuses jeunes femmes activistes utilisent les réseaux sociaux pour dénoncer les injustices, mobiliser l’opinion et organiser des manifestations pacifiques. Elles mettent en lumière les problématiques de la santé menstruelle, du harcèlement de rue et de la sous-représentation politique, incarnant une forme de féminisme renouvelé, plus direct et digitalisé. Parmi ces organisations de mobilisation citoyenne, on trouve le Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée (CJFL-Guinée), fondé en 2016, et qui se concentre sur les droits des femmes et des enfants, lutte contre les mariages forcés, les violences conjugales, les mutilations génitales féminines, avec des cellules d’écoute, des forums de la jeune fille ; enfin, la création, en juin 2025, d’un nouveau Conseil national des filles et des femmes de Guinée (CONAFFEG) qui constitue un organe consultatif pour amplifier la voix des femmes.
Ces initiatives témoignent d’une diversification des champs d’action et d’une prise de conscience que l’égalité se construit par l’action à la base.
L'Allègement des Tâches Domestiques
La reconnaissance de l’égalité et la participation accrue des femmes au marché du travail mettent en lumière le fardeau des tâches domestiques non rémunérées (notamment la corvée d’eau).
- Redistribution : Bien que les structures patriarcales maintiennent souvent une charge disproportionnée sur les femmes, l’évolution des mentalités et les efforts de sensibilisation (souvent portés par les mouvements actuels) commencent à plaider pour un partage plus équitable de ces tâches avec les maris et les enfants.
- Temps Libéré : Chaque heure économisée par la mère sur les tâches domestiques est une heure qu’elle peut investir dans son activité professionnelle, son éducation, son engagement communautaire, ou dans l’attention et le soutien scolaire de ses enfants. C’est un gain direct pour le développement humain de toute la famille.
L'Esprit d'Entrepreneuriat Féminin Africain : Le Modèle des "Nana Benz" au Togo
L’histoire de l’émancipation économique des femmes africaines a un autre visage : celui de l’entrepreneuriat autonome et sans aide. L’exemple des « Nana Benz » au Togo (autre pays de prédilection et d’action de l’association Eau Z’Enfants) est souvent cité pour illustrer le potentiel des femmes à créer des empires économiques par leur seule force de travail et leur sens du commerce.
Ces femmes d’affaires togolaises (qui tirent leur surnom des luxueuses berlines Mercedes-Benz qu’elles se sont offertes grâce à leur fortune) sont devenues des figures emblématiques du commerce de gros du « wax », ces tissus imprimés aux motifs colorés, dont l’origine est hollandaise, mais qui sont devenus l’icône de la mode ouest-africaine.
Elles ont :
- Bâti des fortunes en gérant des circuits d’importation et de distribution complexes.
- Assuré la subsistance et l’éducation de leurs familles, souvent sans dépendre de structures patriarcales.
- Démontré la puissance de l’organisation et de la solidarité féminine dans le commerce.
Cet esprit d’autonomie financière et de débrouillardise, qui se retrouve dans les marchés informels et les petits commerces des pays africains, assure une grande partie de l’économie de subsistance. Son succès, non subventionné, est une source d’inspiration et une preuve que l’émancipation économique est souvent le fruit d’une volonté inébranlable et d’une capacité d’organisation féminine remarquable.
Conclusion : L'Émancipation, un Investissement pour l'Avenir Guinéen
L’émancipation des femmes en Guinée-Conakry est un processus historique et continu. Des héroïnes de l’indépendance aux avocates et activistes d’aujourd’hui, le chemin vers l’égalité est marqué par des victoires juridiques majeures et un engagement politique initial fort.
Aujourd’hui, cet élan doit être soutenu par une application rigoureuse des lois, des investissements ciblés dans la santé et l’éducation féminine, et un soutien à l’entreprenariat. Donner aux femmes leur pleine place dans la vie économique et politique n’est pas une dépense ; c’est un investissement dont les retours sont exponentiels.
L’avenir de la Guinée-Conakry est indissociable de l’avenir de ses femmes. Leur plein épanouissement garantira une génération d’enfants mieux préparés à bâtir une nation forte, juste et prospère.
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